La xénophobie : Le mot du psychanalyste

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La clinique psychanalytique peut apporter sa part d’éclairage sur la xénophobie, par la connaissance d’exemples de réactions névrotiques qui aboutissent à un comportement comparable.

Lorsqu’un homme, comme l’actualité récente nous l’a montré, en arrive à détruire, ou, Dieu merci, seulement imaginer détruire, des personnes sur lesquelles il fait peser la responsabilité d’un « mal », c’est souvent pour se décharger de sa propre responsabilité inconsciente de ce « mal », qu’il rejette en quelque sorte hors de lui, afin de diminuer l’angoisse.

La xénophobie, cette horreur de l’étranger est une façon parmi d’autres de réaliser cette décharge.

Souvent, l’étranger tellement détesté n’est qu’une représentation de la personne elle même, qui s’est sentie rejetée, mal aimée dans sa petite enfance, et qui, à cette époque, s’est sentie étrangère, de trop, ou trop différente, et qui porte en elle son rejet (réel ou fictif) comme une condamnation. Car le petit enfant se perçoit comme responsable de ce qui lui arrive, s’il est rejeté, c’est qu’il est rejetable ; avec nos mots d’adultes nous disons qu’il se sent inconsciemment « coupable ».

L’inconscient du petit enfant n’a pas la capacité de se rebeller contre ce qui lui arrive, il ne peut remettre en question l’attitude de ceux qui lui fournissent les matériaux dont il se construit, c’est-à-dire, ses parents ou ses éducateurs, il ne le peut, même si ces matériaux incluent son propre rejet. Peu à peu il deviendra ce qu’on aura fait de lui, un rejeté, Il va généralement refouler l’agressivité qu’engendre une telle frustration affective, il va la refouler tant qu’il peut, mais la culpabilité, ressentie comme une angoisse reste là, et toute tentative de s’intégrer, de trouver enfin sa place, d’arriver à d’être aimé, à d’être attendu, sera combattue.

Quelque chose ne passe pas, en fait, nous observons que cette condamnation est devenue partie intégrante de la personne, qui va se comporter comme « maudite », donnant l’impression d’attirer sur elle tous les malheurs possibles, c’est que cette partie du Moi devenue inconsciente et que nous appelons le Surmoi « respecte » le sentiment d’être « à rejeter » acquis dans l’enfance.

Il est ainsi des êtres qui ne supportent pas le moindre compliment, la moindre manifestation de sympathie ou d’amitié, la moindre réussite et qui font tout pour se faire rejeter, ou pour échouer.

Lorsque ce sentiment de culpabilité est trop fort, ne pouvant pas, à cause du refoulement, prendre conscience du rejet parental ou familial qui est à son origine, la personne peut tenter de la rejeter sur autrui, sur une personne, par qui elle se sentira rejetée ou persécutée, et qu’elle tiendra pour responsable de son rejet, de son échec, de son isolement.

Cette culpabilité peut être partagée, elle est en effet plus facile à supporter en bande, c’est ainsi qu’elle peut adhérer à des organisations de rejetées, associations de pauvres êtres qui se donnent l’apparence de « durs », de « voyous » ou de « casseurs », comme les skinheads, ou les néo-nazis, ils peuvent alors trouver, en bande, une minorité à laquelle ils vont faire porter la responsabilité de leur échec, la xénophobie organisée est souvent le résultat d’un tel effet de bande, car les étrangers sont tout indiqués, surtout s’ils ont une caractéristique physique ou culturelle qui en fait une minorité visible, pour ce rôle de bouc émissaires.

Ainsi les xénophobes croient rejeter, et ils sont rejetés.

Certains finalement trouveront entre les murs des prisons, le seul endroit où ils se sentiront chez eux, où il auront enfin leur place, celle du « à rejeté », parmi les rejetés.

Hélas, il aura fallu pour cela qu’ils posent des actes horribles, que des familles soient plongées dans le deuil et la détresse. Mais qui, avant que de tels actes n’arrivent, a vu la souffrance de ceux qui se sentent ainsi rejetés, exclus ?, qui voit en eux le sommet de l’iceberg de la misère affective flottant sur la mer d’égoïsme forcené dans laquelle la société toute entière plonge lentement mais sûrement ?

Par Jacques Janssens, Psychanalyste, docteur ès sciences

http://users.skynet.be/fb125004/jjps.htm

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