Témoignages

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Semira Adamu est une jeune femme d’origine nigériane. Grâce à son courage elle est devenue un symbole de résistance.
« La vie au centre est très ennuyeuse. (…) Ici, c’est vraiment horrible. On se réveille le matin et on regarde la télévision jusqu’au soir.(…) Je me sens très seule. La plupart des gens que je connaissais, ils les ont transférés dans d’autres centres. Je ne sais même pas où ils sont. Je suppose qu’ils essayent de nous isoler, de rompre les contacts qu’on peut établir avec les autres.
Après l’évasion, j’ai eu tous les employés sur le dos. On me surveille tout le temps, j’ai toujours quelqu’un derrière moi.(…) Les règles de vie changent tous les jours. Un jour quelque chose est permis, le lendemain, ça ne l’est plus. Ils ne laissent pas les gens de l’extérieur vous rendre visite. Officiellement, les visites sont autorisées, mais quand quelqu’un fait une demande, ils ne l’accordent pas, ou ils ne donnent pas de réponse, tout simplement.(…) Il y a des gens d’ONG qui viennent, mais pas souvent. Il y en a un qui est venu me voir, il y a deux jours, mais il ne m’a pas beaucoup parlé. De toute façon, quoi qu’on puisse dire, rien n’en ressort vraiment, rien ne change.
Ils ont essayé de m’expulser quatre fois. La première fois, ils ne m’ont pas forcée. Ils m’ont emmenée à l’aéroport. Là ils m’ont demandé si j’acceptais l’expulsion. J’ai dit non et ils m’ont ramenée au centre. La deuxième fois, ça s’est passé de la même manière, mais ils m’ont prévenue que la fois suivante, ils seraient plus durs. La troisième fois, ils m’ont préparée pour aller à l’aéroport et puis en dernière minute, nous ne sommes pas partis. Ils m’ont dit qu’ils avaient oublié de réserver ma place sur le vol. Je suppose qu’ils avaient plutôt peur des manifestions de soutien qui étaient organisées pour moi. La quatrième fois, ça a été terrible. J’ai été réveillée à 6h30 par une employée qui m’a annoncé que je devais retourner dans mon pays et que j’avais 20 minutes pour emballer mes affaires. Je n’ai même pas eu le temps de prendre une douche et j’ai oublié quelques affaires dans la précipitation. Finalement j’ai été prête et ils m’ont escortée jusqu’à la porte d’entrée et ils m’ont fait monter dans le fourgon pour l’aéroport. A l’arrivée, ils m’ont attaché les bras à deux endroits et aussi les jambes. Puis ils m’ont enfermée dans une cellule d’isolement, j’y suis restée de 7h à 10h30. Ils sont venus me chercher. On est allé à l’avant de l’avion et on y est resté jusqu’à 11h15, quand ils m’ont fait embarquer. Une fois à l’intérieur, j’ai commencé à crier et à pleurer. Huit hommes se sont rassemblés autour de moi, deux gardes de la sécurité de la Sabena et six policiers. Les deux gardes de la Sabena m’ont forcée : ils poussaient partout sur mon corps et l’un d’eux compressait un oreiller sur mon visage. Il a presque réussi à m’étouffer. En fait, ces deux gardes devaient m’escorter jusqu’à Lomé. Puis les passagers sont intervenus et ils ont dit qu’ils allaient sortir de l’avion si on ne me libérait pas.(…) Il y a eu une bagarre dans l’avion et ils ont dû me débarquer.(…) Après quelque temps, ils m’ont renvoyée au centre et ils m’ont encore placée en cellule d’isolement.(…) J’étais dans la cellule quand ils ont amené les quatre filles qui avaient essayé de s’évader. Nous devions toutes rester dans la même cellule, une petite pièce avec seulement un lit et un WC.(…) Les choses ont repris leur cours dans le centre – à part le renforcement de la sécurité – et à l’aéroport, où certains seraient capables de tuer. Je ne sais pas quand ils vont encore essayer de m’expulser. Ils ne nous disent plus quand ça va être. Ils viennent juste vous réveiller quelques minutes avant de partir. Mais on sent quand une expulsion va avoir lieu. On le sent et on se sent mal, très malheureux. Dans ces moments-là, on sent vraiment qu’on est prisonnier. (…)Je ne sais pas quand ils vont encore venir me chercher. La vie est très difficile pour moi… Je ne sais pas… »

Semira Adamu, nigérienne.

« Je ne comprends plus rien. Ca fait 13ans que je suis en Belgique. J’ai demandé l’asile en 1991 et j’ai eu une réponse négative. J’ai demandé la régularisation en 2000 avec la loi de 1999. Et je l’ai eue, en 2001 ! J’étais heureux monsieur, heureux. J’ai pu travailler, pas faire ce que je voulais, mais gagner un peu d’argent. Déclaré et tout ça. Et surtout, j’allais enfin pouvoir retrouver ma femme, après toutes ces années. J’ai fait toutes les démarches. Ca a été long mais elle a eu un visa pour le regroupement familial. Elle est arrivée en décembre. C’était magnifique. Tout allait bien et puis j’ai perdu mes papiers. J’ai fait la déclaration et ils ont dit qu’ils allaient m’en donner de nouveaux. (…) Et là, il y a eu un problème : ils ont pris mes empreintes digitales et ils ont dit qu’elles ne correspondaient pas avec celles de 1991 ! Pourtant c’est moi ! Ils ont tous les papiers ! Ils ne me croient plus : ils disent que je ne suis pas du Togo parce que je parle anglais. Pourtant, je leur ai expliqué dix fois que je suis né au Ghana mais avec la nationalité togolaise. Ils m’ont arrêté et conduit ici. J’ai eu des nouvelles de ma femme : ils l’ont arrêtée aussi ! Ils lui ont dit qu’elle devait aller voir la police pour régler des papiers et ils l’ont arrêtée. Et, il y a trois jours, quand j’ai appelé ma famille à Lomé, ils m’ont dit qu’elle avait été expulsée ! Oui, expulsée ! Elle est enceinte de trois mois ! Vous vous rendez compte ? Pourquoi ils ont fait ça ? Ils ne m’ont même pas prévenu ! Je n’étais même pas au courant qu’elle était partie ! Pourquoi ? »

Mustapha, Togolais, 35 ans.

 

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