Le Racisme, dur et sournois, se banalise.

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Le Racisme, dur et sournois, se banalise.

1er août 2006

La loi antiracisme a 25 ans. Elle garde toutes ses raisons d’être : le mal reste implanté. Le dispositif légal a évolué, incluant d’autres motifs de discrimination : âge, sexe… S’oriente-t-on vers une forme de dépénalisation du racisme ?
Par ANNICK HOVINE

Ce 30 juillet, la loi contre le racisme a 25 ans. Un quart de siècle au bout duquel on aurait aimé conclure qu’elle est désormais inutile. Ce n’est hélas pas le cas. Les événements qui se sont produits en mai dernier à Anvers, où un jeune a grièvement blessé une femme turque et abattu une nounou malienne et l’enfant qu’elle gardait, pour la seule raison qu’elles n’avaient pas la bonne couleur de peau, le démontrent tragiquement.

Ces faits exceptionnels par leur gravité ne peuvent pourtant pas masquer un racisme qui continue à s’insinuer dans le quotidien. Le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme (CECLR) le constatait récemment, en publiant son rapport annuel 2005 : le racisme est sournoisement implanté dans notre société.

Condamnations

La loi du 30 juillet 1981 (aussi appelée loi Moureaux), punissant d’un emprisonnement (d’un mois à un an) et/ou d’une amende « quiconque incite à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne, en raison d’une prétendue race, de sa couleur, de son ascendance ou de son origine nationale ou ethnique », reste tristement d’actualité.

Certaines dispositions de la loi connaissent une jurisprudence qui permet assez clairement de fixer les balises de ce que notre société admet ou n’admet pas, indique-t-on au CECLR. Exemples : les injures publiques à caractère raciste ou xénophobe ; la propagande des partis qui basent leur programme sur la haine et le rejet des étrangers ; les refus d’accès aux dancings en raison d’un teint trop basané… Des jugements sont intervenus pour condamner ces comportements racistes. La cour d’appel de Liège a ainsi confirmé la condamnation d’une propriétaire qui a résilié de manière unilatérale un contrat de bail après s’être aperçue que l’époux de sa locataire était d’origine soudanaise. Trois personnes ont été condamnées à Anvers pour avoir diffusé la « Makakkendans » (« danse des Macaques »), version raciste de la chanson populaire du « lutin Plop ». Et on se souvient aussi de la condamnation, pour racisme, de trois associations satellites du Vlaams Blok, rebaptisé depuis Vlaams Belang.

S’agissant de la discrimination en matière d’emploi (lire ci-contre), l’application jurisprudentielle reste, en revanche, très pauvre. Ce qui ne veut pas dire que la loi n’a aucune incidence. Les partenaires sociaux ont en effet inséré des clauses de non-discrimination dans différents types de règlements et mis au point des plans de diversité.

Innovation

Depuis 1981, la loi a évolué, incluant désormais d’autres motifs (âge, handicap, sexe, orientation sexuelle…) dans le dispositif antidiscriminations. Pour ne pas créer de discriminations… entre les causes de discrimination, le Conseil des ministres a adopté en première lecture trois avant-projets de loi.

Innovation significative : la mise en place d’une procédure civile avec dommages et intérêts forfaitaires pour les victimes de discriminations, en matière d’emploi et dans l’offre de biens et de services. Conséquence, en matière de racisme : une dépénalisation partielle du dispositif existant, soulève le Centre pour l’égalité des chances.

Nul ne pouvant prédire le sort, plus ou moins heureux, de la procédure civile et du mécanisme d’indemnisation forfaitaire, le Centre souhaiterait idéalement que puissent coexister les deux modes de procédure (pénale et civile), le temps de mesurer l’efficacité de l’une et de l’autre avant de choisir.

© La Libre Belgique http://www.lalibre.be

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