Enseigner après Auschwitz… (1)

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ou l’unicité d’Auschwitz

Auschwitz, 60 ans de la libération du camp. D’aucuns se demandent pourquoi commémorer ce moment particulier. Et en quoi ce moment est-il particulier dans une histoire copieusement faite de bruits et de fureurs, de guerres et de massacres… Pierre Davreux tente une réponse.

Préambule

Nous tenterons d’opérer un pas, un pas un peu ambitieux en tant qu’il est porté par la volonté politique de passer du “réfléchir” au “penser”, c’est-à-dire du plan lourdement moral et affectif où est posé avec fébrilité le “devoir de mémoire” à la question éminemment politique du “travail de mémoire” qui ne peut plus être différé, notamment dans le champ de l’éducation et de la culture.

EDUQUER APRES AUSCHWITZ…

Cette formule m’autorise à considérer que la question de l’éducation ne peut être posée, à nouveaux frais, QU’APRÈS celle d’Auschwitz. Aborder la question de l’éducation, certes, mais seulement APRÈS avoir appréhendé et pesé ce dont le réel d’Auschwitz fait signe.

Aussi, l’essentiel de mon intervention consistera-t-il en un essai de mise en évidence de quelques considérations à partir desquelles peut être élaboré ce à quoi et en quoi Auschwitz nous oblige. Non pas cet Auschwitz commémoré comme catastrophe inouïe – oeuvre de bourreaux survenus du néant – écrasant de son inhumanité paroxystique une généreuse civilisation tout orientée vers le progrès de l’humanité… Mais Auschwitz en tant qu’aboutissement exemplaire de cette civilisation, lorsqu’elle nourrit en son sein une négativité qui l’inverse irrésistiblement en son contraire. Irrésistiblement, dans l’exacte mesure où cette civilisation et l’oeuvre éducative qui en assure la propagande ver-tueuse imposent de ne les penser que comme pure positivité, et par tous les moyens techniques et scientifiques disponibles, y compris, aujourd’hui, neuro-psycho-socio-linguistiques. Car il en va ainsi, de la “barbarie douce”, dans l’école et l’entreprise, comme nous en alertent depuis plusieurs années Jean-Pierre Le Goff et quelques autres [1].

La mesusah de la maison vide

Dans les années 80, il m’est apparu, de manière de plus en plus incontournable, que la question de “l’éducation populaire” et de ses méthodes pédagogiques ne pouvait plus être envisagée sans être subordonnée à cette autre question : “quelle action culturelle, éducative, politique, après les camps et l’extermination ?”. Cette interrogation s’était imposée progressivement à moi au gré d’une évolution marquée de différents événements.

D’abord, un souvenir insistant de ma petite enfance. Ce minuscule rouleau de parchemin recouvert d’une écriture serrée et mystérieuse découvert par ma mère dans l’encoignure d’une porte de la maison où elle avait été relogée à la fin 1940, mon père étant prisonnier quelque part en Allemagne. Ma mère rentrait de “l’exode” qui l’avait menée, enceinte jusqu’aux yeux, avec mes deux soeurs, du Luxembourg belge à cette petite sous-préfecture du Limousin où je devais naître bientôt.

Dès mes premières questions d’enfant relatives à ce minuscule rouleau de mystère [2] étonnamment rebelle aux doigts qui cherchaient à le dérouler, on me donna comme explication qu’il s’agissait sans doute d’une prière oubliée là par les Juifs qui auraient occupé la maison avant guerre et dont on avait perdu la trace… Sauf celle-là, justement : ce fragment d’écriture, muette d’être illisible, signe étrange d’un monde absent, énigme mille fois revisitée par le gamin que j’étais, sans que personne puisse jamais m’aider à comprendre vraiment ce qu’il faisait là et ce que nous faisions là, dans ce lieu étonnamment libéré de ceux qui nous y avaient précédés…

Plus tard, ce fut la rencontre de l’amie juive de mes trente ans, Thérèse la Bruxelloise, dont la totalité de la famille restée en Pologne avait été assassinée dans les camps. Ce qui m’amena notamment à ne plus jamais confondre, de manière imbécile, camps de concentration et camps d’extermination.

En 1973, j’ai eu l’occasion de me rendre à Auschwitz. Je participais alors à un voyage d’étude sur “l’éducation populaire” telle qu’elle s’organisait, à l’époque, en Pologne. Il avait fallu ruser très tôt avec nos guides pour gagner quelque liberté et tromper leur prévenance afin de rejoindre ces opposants qui attendaient, dans la banlieue de Varsovie, des informations et des documents rassemblés à Louvain.

A Auschwitz, j’ai été été triplement heurté, puis mis en colère, par les conditions dans lesquelles s’est effectuée la visite du camp qui avait été organisée pour l’édification de notre petite délégation vertueuse de militants d’éducation populaire.

Dans le discours de nos accompagnateurs et sur les plaques commémoratives, aucune évocation des Juifs. Seul, un efficace martyrologue d’innombrables victimes indifférenciées du nazisme, quoique surtout communistes et polonaises…

C’était l’automne. La nuit tombait. Il pleuvait. Les murs de briques noircies ruisselaient, poisseuses. Un décor de ruines, idéalement requis pour que notre petit groupe puisse enfin se lâcher – c’est le terme – à l’issue du parcours, dans un insupportable épanchement de pathos sordide mêlant compassion gémissante pour toutes les victimes confondues du fascisme (!) et bonne conscience car, cela allait de soi, tous, autant que nous étions, savions depuis longtemps que la barbarie était le fait de cet impérialisme et de ce capitalisme sauvages que nous réprouvions du plus profond de notre sensiblerie moraliste, pour les uns, du plus haut de notre progressisme politique, pour les autres.

Dans les heures et les jours qui ont suivi cette traversée voyeuriste et pleureuse d’Auschwitz, quand il s’est agi d’aborder, même timidement, quelques questions relatives à la nature des régimes totalitaires qui ont marqué de manière décisive le XXe siècle, toute parole risquant de mettre mal à l’aise nos hôtes polonais – nous sommes en 1973, la Pologne est toujours sous régime communiste – est brutalement parasitée et les traducteurs sont explicitement invités par les plus staliniens de notre groupe à ne pas traduire .

Marc Vignal d’abord, musicologue passé plus tard à France Culture, coordinateur du voyage d’étude, futur président du mouvement d’éducation populaire “Peuple et Culture”. Puis Henri Gobard, honorable universitaire, professeur de linguistique, qui devait donc savoir assez bien ce que parler veut dire. Ils réagissaient par la colère chaque fois que les échanges se rapprochaient de considérations politiques, philosophiques et historiques susceptibles de mettre en difficulté, selon leurs sentiments, nos interlocuteurs polonais officiels. J’ai le souvenir encore cuisant d’un incroyable psychodrame qui arrêta net un début d’échange relatif aux choix pédagogiques présidant à l’approche de la “pensée dialectique” dans le champ de l’éducation populaire en Pologne. Les responsables que nous rencontrions s’en tenaient à la vulgate des “matérialismes dialectique et historique” référée aux seuls écrits de Staline, de Lénine et d’Engels. Les staliniens de notre groupe assuraient énergiquement leur fonction : rendre impossible tout questionnement susceptible d’ouvrir la voie au débat, à la critique.

L’époque était encore au marxisme dogmatique faisant rageusement obstacle – idéologiquement, organisationnellement et universitairement – à toute étude des conditions d’émergence et de développement des régimes criminels faisant appel à des analyses susceptibles de déboucher sur une mise en relation critique du nazisme, du fascisme et du “socialisme réel”.

Nulle place donc pour les travaux des “marxistes indépendants ou non-léninistes”. Silence total sur les Cornélius Castoriadis, Pierre Legendre, Edgar Morin, Maximilien Rubel, Joseph Gabel, Maurice Merleau-Ponty, Karel Kosik, Daniel Guérin, Henri Lefèbvre, René Lourau, Anton Pannekoek, Pierre Clastre, Bruno Rizzi, Claude Lefort, Simon Leys et tant d’autres dont les analyses ont contribué largement à faire progresser la connaissance des régimes totalitaires et bureaucratiques.

Dès le début des années 1970, je faisais régulièrement la navette entre Bruxelles et Paris pour le séminaire d’Yvon Bourdet (sociologie de l’autogestion – 6ème section de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes) qui me fit découvrir certains des auteurs qui viennent d’être cités. J’ai saisi la chance qui s’offrait alors à moi de rejoindre, une à deux fois par mois, le séminaire que Lacan tenait à la fac de Droit, rue Saint Jacques, dans le programme de la même E.P.H.E. [3], “la grand-messe” diront ses détracteurs.

Avec la voix vive de Lacan et la lecture que je tentais de ses séminaires, je découvrais une autre approche de la problématique qui nous occupe ici. Les camps et l’extermination étaient éclairés à partir de la subversion freudienne qui permettait d’attaquer l’angle mort des analyses politiques développées par la plupart des marxistes pourtant non dogmatiques que je découvrais, parallèlement, au séminaire de Bourdet.

Il fallait maintenant me résoudre à l’évidence : “les assassins sont partie intégrante de l’espèce humaine” [4] et le désastre d’Auschwitz interdit – sauf à aplanir les voies qui y mènent [5] – de dissocier l’inhumain de l’humain, dans le travail de la pensée censée éclairer l’engagement du militant culturel et politique.

Au milieu des année 1960, Lacan rattache définitivement son enseignement et “la fondation de son école à l’événement Auschwitz” [6]. Il y a été aidé par une de ses analysantes, Anne-Lise Stern, devenue psychanalyste après avoir été déportée à Auschwitz-Birkenau, constituant ainsi une exception dans le champ psychanalytique ; ce qui est loin de lui avoir facilité la tâche tant le refus de savoir est aussi efficace là qu’ailleurs. Depuis, elle n’a cessé de soutenir un questionnement déterminé par son expérience des camps, dans les milieux psychanalytiques les plus divers, qui l’écoutaient souvent plus poliment qu’ils s’en laissaient atteindre. Puis elle s’autorisa à poser avec force la question “quelle psychanalyse après Auschwitz ?”, alors que Claude Lanzmann, avec son film “Shoah” (1985) faisait oeuvre en “s’opposant à toute jouissance de l’horreur” [7] tout en faisant savoir, à qui voulait l’entendre, que beaucoup savaient… A l’horizon de mes cinquante ans, je demandais à Anne-Lise Stern, de m’accepter en analyse, avec un incroyable argumentaire politico-pédagogique, tartiné dans une longue lettre écrite une nuit d’un seul trait… Il m’a fallu du temps pour me laisser aller à imaginer le “rire de Dieu” – merci Kundera [8] – que provoqua, j’en suis sûr maintenant, une demande d’entrée en analyse ainsi torchée…

“Quelle psychanalyse après Auschwitz ?”. C’est le tranchant de cette question d’Anne-Lise Stern qui me renvoya à mes affaires, entre autres à ma responsabilité de formateur, d’éducateur. D’éducateur, à qui revient maintenant la charge des deux interrogations majeures que je ne peux plus ni éluder ni différer, l’enchantement n’étant plus de mise. La première, assez générale : “quelle éducation après Auschwitz ?”. Puis la seconde, nettement plus précise, celle que je me fatigue depuis quelque temps à tenter de la rendre incontournable à mes collègues et amis : “quel méthodes d’intervention, en “éducation populaire”, après Auschwitz ?”

Oui, mais pourquoi seulement Auschwitz ?

Depuis des années, dans le petit monde éducatif et associatif que je fréquente, chaque fois que je risque mes inquiétudes et les questions auxquelles elles conduisent, il me faut expliquer encore et toujours, mais surtout m’expliquer c-à-d me justifier.

Surtout lorsqu’ils se posent avec assurance comme au fait de la problématique de l’éducation populaire, de l’éducation permanente, de la formation continue aujourd’hui, la plupart de mes interlocuteurs m’invitent sans même avoir besoin de se concerter, tellement cela va de soi pour eux, à ne pas trop insister sur Auschwitz et à réinscrire l’affaire des camps dans le douloureux catalogue des horreurs humaines dont aucune n’est à distinguer des autres tant elles ont été aussi monstrueuses les unes que les autres – donc équivalentes – tout au long du XXème siècle…

L’invitation au “travail de la mémoire” – à ne pas confondre avec le “devoir de mémoire” – provoque sans retard un tumulte mémoriel suspendant la pensée et débouchant sur la mise en concurrence des mémoires. “Si tout le monde a souffert, de quel droit les Juifs pourraient-ils invoquer, plus que d’autres, leur souffrance passée ?” [9]. A l’évocation d’Auschwitz – en clair de la Shoah [10] – il faut donc sans tarder rajouter Hiroshima, Verdun, Dresde, le Goulag, la Vendée, le Kosovo, la Saint Barthélemy, le Cambodge, Nagasaki, l’Arménie, Chabra, Chatila, la Kolima, les Croisades, le Rwanda, l’esclavage, la liquidation des Amérindiens, le prétendu génocide palestinien et même la peste ! Dans les milieux que je fréquente je n’ai jamais rencontré jusqu’à présent quelqu’un qui m’ait interpellé dans le sens inverse, m’invitant à passer de l’un ou l’autre point de l’énumération rapide que je viens d’évoquer, à Auschwitz, aux camps, à l’extermination, au génocide des Juifs et des Tziganes.

Permettez-moi de citer Joffre Dumazedier, premier sociologue en France à avoir étudier l’idée de “civilisation des loisirs”, Résistant passé de “l’Ecole d’Uriage” [11] à la clandestinité en 1942, président-fondateur du mouvement “Peuple et Culture”, professeur à la Sorbonne et initiateur de la démarche d’éducation populaire appelée “entraînement mental” dont j’ai souvent débattu avec lui :

“Quand on lit « L’histoire des fléaux et des calamités en France » par l’historien Delumeau, avec les barbarie en tous genres, les millions de tués par la peste, la Saint Barthélemy etc.,” constatons que “… ces horreurs ne datent pas d’hier, quelle que soit la monstruosité des six millions de juifs exterminés” [12].

Je relève la formulation : “la monstruosité de six millions de juifs exterminés”. Ce n’est pas tout fait la même chose que : “la monstruosité de l’extermination de six millions de juifs” ou “l’extermination monstrueuse de six millions de juifs”.

Chaque fois, donc, je suis invité, avec insistance, à relativiser Auschwitz, en l’alignant sur la masse indifférenciée des diverses formes de violences et de barbaries repérées dans l’histoire humaine depuis la nuit des temps…

J’ai fini par comprendre que la réflexion souvent entendue “on ne parle pas assez d’Hiroshima” [13], comme première réaction assez spontanée à l’évocation d’Auschwitz, assurait la fonction d’un “on parle trop d’Auschwitz” qui, autant laïquement que chrétiennement, n’ose se dire aussi crûment, pour l’instant… L’invitation à relativiser Auschwitz par un comparatisme insistant gommant la singularité de la Shoah poursuit le travail souterrain du négationnisme et du révisionnisme, tout en douceur. C’est là son extrême violence. Et son extrême obscénité, lorsque ce relativisme s’accompagne de grandiloquence commémorative, où les uns et les autres rivalisent d’indignation, de “devoir de mémoire” et de “plus jamais ça”, soudés dans la négation compulsionnelle de “la dimension humaine du mal” [14].

A suivre…

[1] Jean-Pierre Le Goff : “La barbarie douce – La modernisation aveugle des entreprises et de l’école”, La Découverte, 2003, 142 pages ; “La démocratie post-totalitaire”, La Découverte, 2002, 203 pages.

[2] La tradition religieuse veut que sur le montant de la porte de chaque maison juive soit accrochée une petite boîte appelée “mesusah” dans laquelle on dépose un petit rouleau de parchemin contenant certains passages de la bible. Par cette coutume, les juifs pratiquants expriment la conscience de respecter un commandement et manifestent leur confiance dans la protection divine. Cette protection concerne en premier lieu la maison et ses habitants. En hébreu, “mesusah” signifie littéralement “montant de porte”. Une belle charge symbolique pour un utile montage menuisier.

[3] C’est à partir de cette 6ème section de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes (E.P.H.E.) que s’est constituée plus tard l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (E.H.S.S.).

[4] page 23, Georges Bensoussan, “Auschwitz en héritage ?”, Editions mille et une nuit, 1998, 206 pages.

[5] “Dans le monde réel, les hommes armés existent, ils construisent Auschwitz et les honnêtes et les désarmés aplanissent leur voie ; c’est pourquoi chaque Allemand, plus, chaque homme doit répondre d’Auschwitz et qu’après Auschwitz il n’est plus permis d’être sans armes.” Page 242, Primo Levi, “Le système périodique”, Le livre de poche n°3229, 2001, 253 pages.

[6] page 410, Elisabeth Roudinesco, “Jacques Lacan – esquisse d’une vie, histoire d’un système de pensée”, Fayard, 1993, 723 pages.

[7] Anne-Lise Stern, “La savoir-déporté – camps, histoire, psychanalyse”, Seuil, 2004, page 248.

[8] Discours de Jérusalem : le roman et l’Europe – Milan Kundera, “L’art du Roman”, Gallimard (Folio), 1995, 198 pages.

[9] Georges Bensoussan, op. cit., pages 27-28.

[10] Shoah, écrit parfois Shoa. Mot hébreu signifiant « anéantissement ». En France, depuis le film de Claude Lanzmann, il prend irréversiblement le pas sur la notion générale et imprécise de « massacres », sur le terme clinique ou technique de « génocide » (construit en 1944 par le juriste juif polonais Raphaël Lemkin) et sur celui, plus religieux, « d’holocauste ». Ce n’est pas le cas aux Etats-Unis ou en Israël (holocaust), ou encore en Allemagne (Endlösung, Vernichtung). Holocauste : du latin ecclésiastique d’origine grec holocaustum signifiant “brûlé tout entier” ; chez les Juifs il désigne le sacrifice religieux où la victime offerte à Dieu (le bélier) est entièrement consumée par le feu. “L’histoire seule du mot Shoah est en soi une leçon d’Histoire” (G. Bensoussan, op. cit. p. 19).

[11] Ecole nationale des cadres d’Uriage (première période : juillet 1940 – décembre 1942). Au moment de la prise de contrôle total de cette “école d’Uriage” par la Wehrmacht et la milice – Noël 1942 – ses responsables basculent dans la résistance clandestine : Joffre Dumazedier, Hubert Beuve-Méry, Pierre Dunoyer de Segonzac, Benigno Caceres, etc.. Bernard-Henri Lévy – qui semble n’avoir pas compris grand chose à ce qui s’est joué à Uriage avant ce Noël 42 puis après, dès que Vichy en a fait son école des cadres de la Milice (deuxième période : 43-44) – ne voit dans ce passage collectif à la résistance clandestine, en 1942, qu’un étonnant “paradoxe”. Cette rupture dans l’histoire d’Uriage doit sans doute heurter son entendement trop formellement classificatoire d’une complexité de situation qui lui échappe un peu, tant est grande sa précipitation post festum à dénoncer le vichysme de tous, avec juste un petit bémol, à peine désintéressé, sauvant la mise à Beuve-Méry, fondateur du journal “le Monde”… (voir les pages 49-54 de “L’idéologie française”, Bernard-Henri Lévy, Grasset, 1981, 341 pages).

A noter que c’est au moment où J. Dumazedier bascule d’Uriage à l’organisation des “équipes volantes culturelles” qui vont relier une quarantaine de maquis du Vercors jusqu’à la Libération, qu’il baptise sa démarche socio-pédagogique d’éducation populaire “l’entraînement mental”. Je tiens cette précision de lui-même. 1942, c’est également l’année de la conférence de Wannsee…

[12] Lettre de Joffre Dumazedier à Pierre Davreux, le 9 juin 1998.

[13] Lettre de Jean Remi Durand Gasselin – responsable du secteur Education populaire et Formation de “Peuple et Culture” – à Pierre Davreux, le 1 mars 1999.

[14] Georges Bensoussan, op. cit., page 23.

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